Secteur bancaire : Les indicateurs du risque de crédit impactés par la persistance des difficultés des opérateurs économiques en 2024 (BCT)

Au cours de l’année 2024, l’écart entre le rythme d’accroissement du crédit bancaire (2,8% en 2024 et en 2023) et celui de la croissance économique aux prix courants (8,9% en 2024 contre 9,4% en 2023) s’est davantage creusé. Cette situation est expliquée par la poursuite de la faiblesse de la dynamique des crédits. C'est ce qui ressort du rapport de la Banque Centrale de Tunisie, publiée cette semaine, et relatif à l'année 2024.
 
Selon l'institut d'émission, l’année dernière a connu une poursuite de l’accroissement des financements bancaires du secteur public pour représenter 24,7% du total des actifs du secteur contre 21,6% en 2023.
 
Les indicateurs du risque de crédit ont été impactés par la persistance des difficultés des opérateurs économiques notamment les PME comme en témoigne la hausse de la part des créances classées dans le total des engagements à 14,1% à fin 2024 (contre 13,6% à fin 2023) et ce, en dépit de la hausse de l’encours des créances radiées, déclarées à la Centrale d’informations de la BCT, qui ont atteint 2,7 milliards de dinars en 2024 (contre 2,1 milliards de dinars en 2023).
 
La répartition par type d'agent économique montre la poursuite de la hausse du taux des créances classées des entreprises privées pour atteindre 18,9% à fin 2024 contre 18,7% à fin 2023. Cette tendance haussière a concerné également les particuliers dont le taux de créances classées a atteint 8% contre 7,7% en 2023.
 
En matière de couverture des risques, l’année 2024 a connu une légère baisse du taux de couverture des créances classées par les provisions pour s’établir à 51,4% contre 53% en 2023 et ce, en rapport avec la hausse du volume des créances classées. Par ailleurs, le secteur bancaire a consolidé l’enveloppe globale des provisions collectives pour atteindre près de 2 milliards de dinars, soit un taux de couverture de 1,7% des créances courantes et ce, à la faveur de la révision de la méthodologie de calcul des provisions collectives par la BCT. 
 
Sur un autre plan, l’indice de concentration des crédits (IHH)1 montre un niveau semblable de diversification sectorielle du portefeuille des crédits à celui des deux dernières années, suite à une légère augmentation de l’exposition du secteur bancaire sur les secteurs de l’agriculture et de l’industrie conjuguée à une baisse limitée des parts des secteurs du commerce et de la construction dans le total des crédits à l’économie. Par ailleurs, le secteur bancaire a, davantage, diversifié son exposition sur les groupes et grandes entreprises privées, avec la baisse de la part des crédits accordés aux 5 et 10 plus grands emprunteurs privés dans le total des crédits au secteur privé, revenant, respectivement, de 8,4% et 13,5% en 2023 à 8,2% et 13,4% en 2024.
 
Dans un contexte économique difficile, la BCT a poursuivi sa politique prudente en matière de couverture des risques latents et de consolidation de l’assise financière du secteur bancaire à travers l’encadrement de la distribution de dividendes et le renforcement des règles de calcul des provisions collectives. Conséquemment, les ratios de solvabilité et tier 1 ont enregistré une amélioration pour atteindre respectivement 14,5% et 11,9% à fin 2024 contre 14,2% et 11,3% à fin 2023 avec une structure des fonds propres dominée par les fonds propres de base à hauteur de 81,9%.
 
De leur côté, les indicateurs de rentabilité du secteur bancaire ont continué leur affermissement, en 2024, avec la hausse de la rentabilité des actifs (ROA) et la rentabilité des fonds propres (ROE) pour atteindre, respectivement, 1,2% et 11,4%, en 2024. En effet, le résultat net du secteur et le produit net bancaire se sont accrus respectivement de 12% et de 6,2%. Cette amélioration de la rentabilité provient, essentiellement, d’une hausse de 18,1% des revenus du portefeuille titres et de 4,8% des commissions en dépit d’une baisse de 1,6% de la marge d’intérêts.
 
Le secteur bancaire a poursuivi ses efforts en matière de collecte des dépôts au cours de l’année 2024 avec une croissance à hauteur de 10,3% contre 7,4% en 2023. Cette dynamique a concerné aussi bien les dépôts en dinars qu’en devises progressant respectivement de 10,9% et 7,2%.
 
Ainsi, les pressions sur la liquidité bancaire se sont davantage apaisées en 2024 avec l’amélioration du ratio de liquidité (LCR) pour se situer à 225% contre 188% à fin 2023 et le repli de la part du refinancement dans le total des ressources des banques à 4,6% à fin 2024 contre 4,8% en 2023.
 
Aussi, le ratio de transformation "crédits/dépôts " (LTD) a poursuivi sa tendance baissière pour revenir à 96,2%, à fin 2024, contre 101,4% au terme de 2023 en rapport avec le ralentissement de l’activité de crédit et une évolution soutenue des dépôts.
 
Sur le plan du refinancement du secteur bancaire, le volume des concours aux banques liés aux opérations de politique monétaire a enregistré une hausse de 895 MDT ou de 12,3% en s’élevant à 8.150 MDT à la fin de l’exercice 2024 (contre 7.255 MDT un an plus tôt).
 
Cette évolution trouve son origine principalement dans l’introduction d’un nouvel instrument de refinancement à plus long terme d’une durée de six mois, qui porte sur un encours de 1.705 MDT à la clôture de l’exercice 2024. Toutefois, cette hausse a été atténuée par le fléchissement de l'opération principale de refinancement à 7 jours qui a représenté 57,7% de l'encours total de ces interventions à la fin de 2024, avec un montant global de 4.700 MDT, en baisse de 19%, soit 1.100 MDT, par rapport à 2023.
 
D'un autre côté, l'encours de l'opération de refinancement à un mois a également diminué, revenant de 644 MDT à la fin de 2023 à 361 MDT à la fin de 2024, soit une baisse de 283 MDT. En termes de moyennes annuelles, cet encours s’est contracté revenant de 810,1 MDT à 566,5 MDT d’une année à une autre.
 
Quant à l'encours des titres achetés dans le cadre des opérations fermes, constitués de bons du Trésor à court terme et de bons du Trésor négociables, il est revenu de 8.385,1 MDT à la fin de 2023 à 5.825,3 MDT à fin 2024, soit une baisse de 2.559,8 MDT ou -30,5%.
 
Il est à noter que onze lignes de bons du Trésor sont arrivées à échéance en 2024 pour un montant total de 8.385,1 MDT.
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